mercredi 23 juin 2010

P. 245. Sauvetage de Liba Kornfeld, de Chaja Gitel Rabinovici, de son fils Simon et d'Armand Finkenberg

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Invitation à la cérémonie du 22 juin 2010, Mairie du 13e ar. de Paris (DR).

Paul et Augustine Fiket
Justes parmi les Nations

La Médaille et le Diplôme de Justes parmi les Nations ont été remis à André Fiket, fils des deux Justes défunts, ce 22 juin 2010. Cette cérémonie s'est déroulée à la Mairie du 13e arrondissement de Paris sur invitation du Maire, Jérôme Coumet, de l'Adjointe chargée de la Mémoire et du Monde combattant, Catherine Vieu-Charier et du Comité français pour Yad Vashem qui avait délégué Viviane Saül et Alain Habif.

Synthèse du dossier Yad Vashem :

- "Moïse Rabinovici a été arrêté comme juif et interné au camp de Beaune-la-Rolande, dans le Loiret. Transféré ensuite à Drancy, il a été emporté par le convoi n°53 vers Sobibor où il décéda le 30 mars 1943.
Son épouse, Chaja Gitel Rabinovici, née Kornfeld, trouva refuge dans le 13e arrondissement. En effet, accompagnée de sa mère, Liba Kornfeld, elle fut accueillie par Paul et Augustine Fiket (née Conrath) au 113 de l'avenue d'Ivry à Paris.
Pourquoi avoir frappé à la porte des Fiket ?
D'origine croate, Paul Fiket était un camarade de travail de Moïse Rabinovici. Tous deux étaient ouvriers métallurgistes."

Présentation de la synthèse par Alain Habif, délégué du Comité français pour Yad Vashem (Ph. V. Saül / BCFYV / DR).

Suite de la synthèse :

- "Paul et Augustine Fiket avaient pleinement conscience de risquer leur vie en cachant des persécutées raciales. Ils ont agit par humanité, par compassion et par amitié.

Le couple Rabinovici avait un fils : Simon. Dès l'arrestation de son père Moïse, le bébé fut confié à des paysans de Mercatel, dans le Pas-de-Calais.
En 1944, Augustine Fiket monta vers le Nord pour y retirer l'enfant ainsi que son cousin, Armand Finkelberg, caché là aussi.

La grand-mère Liba Kornfeld, la mère Chaja Gitel Rabinovici, le fils Simon et le cousin Armand Finkelberg échappèrent ainsi à la Shoah...

Jusqu'à son décès en 1970, la mère de Simon eut à coeur de maintenir des contacts avec les époux Fiket et leurs trois enfants."

Portrait de Paul et d'Augustine Fiket (Arch. fam. / BCFYV/ DR).

Extrait de la présentation de Yad Vashem :

- "Créé par une loi du Parlement Israélien en 1953, l’Institut Yad Vashem doit son nom à un verset du chapitre 56 du prophète Isaïe dans la Bible. Il y est écrit : "Et je leur donnerai dans ma maison et dans mes murs, un mémorial (YAD), et un nom (CHEM), en hébreu Yad vashem (mémorial et nom), qui ne s’effaceront jamais".
Cette phrase rend hommage aux Justes parmi les Nations que l’Institut est chargé de reconnaître. Elle est gravée au recto de chaque médaille au nom de l’Etat d’Israël et en signe de gratitude.
Au verso elle comporte la mention "Qui sauve une vie, sauve l’univers tout entier", extraite du Talmud « loi orale ».

Le mémorial Yad Vashem, situé sur la Colline du Souvenir à Jérusalem, a donc pour but de perpétuer la mémoire des six millions de Juifs, de 21 pays d’Europe sous domination du IIIe Reich et qui furent exterminés, par les Nazis et leurs complices. En France, 76.000 juifs furent déportés, dont 11.000 enfants, seuls 2.550 rescapés revinrent des camps d’extermination et aucun enfant ne se trouvait parmi eux. Toutefois, les trois quart des juifs en France ont eu la vie sauve."


Présentation de Yad Vashem et de son Comité français par Viviane Saül, Déléguée (Ph. V. Saül / BCFYV / DR).

Yad Vashem et les Justes (suite) :

- "Ceux qui ont survécu le doivent à des hommes et des femmes non juifs, qui n’écoutant que leur conscience, les cachèrent, les protégèrent et les sauvèrent d’une mort certaine. Célèbres ou anonymes, ces héros étaient de tous âges et de toutes origines, de toutes appartenances religieuses et politiques et de tous milieux sociaux.
Ces hommes et ces femmes d’honneur avaient pour dénominateur commun le respect des valeurs morales, le rejet du fascisme et le courage d’agir malgré les risques mortels encourus. Ces inconnus qui les ont accueilli n’exigeaient rien à l’époque et n’en demandent pas plus aujourd’hui, ils estimaient avoir accompli leur devoir, c’est avec naturel et simplicité qu’ils sont venus au devant des personnes en danger. Ils les ont hébergées, cachées, nourries, leur ont souvent procuré de faux papiers, et ont déployé en leur faveur toute leur énergie et leur imagination, en un temps où il n’était pas bien vu de fréquenter les Juifs, encore moins de les aider, alors que la majorité de la population était, au mieux, passive ou indifférente. Ces Justes ont non seulement sauvé des vies humaines, mais ils ont aussi incarné l’honneur de l’humanité, qui grâce à eux, n’a pas totalement sombré à Auschwitz.

Arracher des Juifs à la Shoah ne fut pas seulement une addition d’actes individuels extraordinaires mais aussi parfois et beaucoup plus rarement, le résultat d’actions collectives.
Voilà pourquoi Yad Vashem a également reconnu comme Justes le Chambon-sur-Lignon (France), le village de Nieuwlande (Pays-Bas), le réseau Zegota (Pologne) et le royaume du Danemark pour son réseau de résistance.

Dans un monde où les discours, les actes de haine et de xénophobie, d’antisémitisme et de diabolisation d’Israël progressent, le rappel des valeurs qu’ont incarnées les Justes hier, nous rappellent à nos responsabilités aujourd’hui : Défendre les valeurs de justice et de paix. L’intolérance, le racisme ne peuvent servir de base à quelque société que ce soit, tout autour de nous dans le monde ces principes sont utilisés par des pouvoirs dictatoriaux ou soi-disant démocratiques, par des groupes sectaires ou intégristes pour justifier arrestations, massacres et génocides."

De g. à dr. :
- Armand Finkenberg, enfant caché,
- André Fiket, fils des Justes avec leur Diplôme,
- Simon Rabinovici, enfant caché.
(Ph. V. Saül / BCFYV / DR).

Extrait du discours de Catherine Vieu-Charier, Adjointe :

- "Il y a 70 ans, dans la défaite de la France, la barbarie nazie qui avait programmé depuis 1933 l'exécution de la solution finale pour les juifs, va la mettre en route dans notre pays, avec la complicité active du gouvernement de Vichy.
(…)
En France même, le pays des Lumières et des droits de l'Homme, des valeurs de la République, le pays où tant d’hommes ont écrit et pensé l’intelligence de l’humanité, le pouvoir de Vichy se déshonore, en établissant dès le 3 octobre 1940, le sinistre statut des Juifs, qui les exclut de presque toutes les fonctions.
Les Juifs de France sont frappés de plein fouet dans leur amour pour la France par cet antisémitisme d'État, dans un pays est celui qui dès 1791, leur a accordé les droits des citoyens.
Les juifs étrangers qui avaient choisi le pays dont on disait que l’on y était heureux comme Dieu en France sont catastrophés.
Tous aiment leur pays passionnément. Ils se sont battus pour lui, en 1914 ou en 1939. Et pourtant Pétain, le vainqueur de Verdun, se déshonore en accompagnant cette politique de mort, et en devançant même les désirs de l’occupant nazi.
Il y a la honte du premier convoi de déportation, le 27 mars 1942. Il y a l'ordonnance allemande du 7 juin avec le signe inimaginable et honteux de l'étoile jaune.
Et puis, le 16 et le 17 juillet, la grande rafle du Vel d’Hiv va emmener des centaines de familles vers la mort, les plaques apposées sur les écoles parisiennes donne l’ampleur du désastre.
La même horreur aura lieu du 26 au 28 août, avec la rafle de milliers de Juifs étrangers en zone libre."

Photo : prononçant son discours, Catherine Vieu-Charier (Ph. V. Saül / BCFYV / DR).

Suite du discours :

- "Mais dans la France affamée, terrorisée, coupée en deux par la ligne de démarcation, des voix s'élèvent, des gens refusent. Des Françaises et des Français en très grand nombre vont montrer que les valeurs de l'humanisme sont enracinées dans leurs coeurs. Partout, ils accueillent, cachent, sauvent au péril de leur vie des enfants, des femmes, des hommes, persécutés parce qu'ils sont Juifs.
Dans ce cauchemar éveillé que les Juifs vivent depuis 1940, la France, leur France, à laquelle ils ont cru si intensément, n'a pas tout à fait disparu. Dans les profondeurs du peuple, une lueur d'espoir brille. Elle est fragile, mais elle existe.
Des milliers de femmes et d’hommes, sans s'interroger, vont faire le choix du courage. Ils viendront de toutes les classes sociales, dans toutes les professions, de tous les courants religieux ou politiques. Tous connaissent les risques encourus : la dénonciation, l’arrestation par la gestapo, la milice, parfois par la gendarmerie et la police. Les interrogatoires et les tortures suivis par le peloton d’exécution ou la déportation.
Mais par mille actions, petites ou grandes, ils vont cacher, protéger et arracher à la mort des centaines de milliers de juifs.
Certains ont été reconnus Justes parmi les nations. Beaucoup d'autres resteront anonymes, parce que c’est ainsi, la vie reprend, les gens sont modestes et il a fallu du temps aussi pour revenir sur ces évènements. Certains sont honorés comme aujourd'hui, avec les époux Fiket, presque 70 ans après."

NB : cette page repose sur les apports de Viviane Saül, Déléguée, qu'elle en soit remerciée.

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