jeudi 27 novembre 2008

P. 89. Le foyer refuge des époux Biewer, Justes parmi les Nations

Château de Haute-Maison, à Sucy-en-Brie (DR).

Rolande et Hélène Smil doivent la vie aux époux Biewer.

Léon Lazar Smil a quitté la Roumanie en 1930 pour une France qu'il espérait terre d'accueil. Comme de nombreux immigrés juifs de l'époque, il manifeste des dons comme artisan tailleur.
En 1933, Léon se marie avec Neti. Le couple aura deux filles :
- Rolande née en 1935 et
- en 1938, Hélène.

La petite dernière se révèle d'une santé fragilisée par une grave broncho-pneumonie. A tel point que l'air des villes lui est vivement déconseillé par les médecins. En conséquence, les parents qui ne peuvent - pour des raisons professionnelles - partir à la campagne, y recherchent une nourrice de confiance. La chance veut qu'ils trouvent Mme Biewer à Sucy-en-Brie. cette dernière est mariée et a elle-même une fille, Louise.

Survient la guerre. Son cortège de persécutions pour les juifs.
Le 24 septembre 1942, des policiers français arrêtent Neti Smil et sa fille, Rolande. Les Biewer l'apprennent et se rendent immédiatement au commissariat pour obtenir leur libération. Alors, du haut de sa toute puissance, un commissaire accepte de laisser partir Rolande mais retient Neti qui sera déportée à Auschwitz.

Léon Smil, lui, échappera aux rafles jusqu'en 1944 quand il finira lui aussi, par être mis en wagon à bestiaux pour Auschwitz.

De manière totalement désintéressée, Jean-Baptiste et Louise Biewer vont non seulement protéger les deux soeurs juqu'à la libération mais les sachant orphelines, ils vont les garder dans leur foyer jusqu'à leur mariage.

La cérémonie de reconnaissance - à titre posthume - de ces deux Justes parmi les Nations, s'est déroulée au Château de Haute-Maison à Sucy-en-Brie le mercredi 26 novembre 2008. Viviane Lumbroso et Paul Ejcherand représentaient le Comité Français pour Yad Vashem.


Le Parisien :

- "Jean-Baptiste et Louise Biewer ont recueilli et ainsi sauvé deux petites filles juives pendant la Seconde Guerre mondiale. Décédés depuis les années 1980, ils recevront néanmoins, ce soir, la médaille des Justes parmi les nations à titre posthume. Leur nièce, Jeannine Eustache-Biewer, réceptionnera, à leur place, cette distinction lors d’une cérémonie organisée dans la salle des mariages de Sucy-en-Brie, au château de Haute-Maison, en présence de Rolande Livartowski, l’une des deux petites filles sauvées. Rolande et sa sœur Hélène, aujourd’hui décédée, ont été recueillies par le couple Biewer en 1942."
(26 novembre 2008).

NB : Remerciements à Arlette Sebag, secrétariat du Comité, pour la documentation sur cette cérémonie.


vendredi 21 novembre 2008

P. 88. Les Justes à Erquinghem-Lys

Les Médaille et Diplôme de Juste parmi les Nations
au nom de Charlotte Olinger
ont été confiés au Musée de la cité d'Ercan
à Erquinghem-Lys

De superbes photos de cette cérémonie sont consultables en cliquant : ICI , le site internet de l'"Association Erquinghem-Lys et son histoire" (1).
En effet, la sensibilité particulière de cette ville du Nord vis-à-vis de la persécution des juifs victimes de la Shoah mais encore des figures exceptionnelles des Justes, a été mise à l'honneur lors de la cérémonie qui s'est tenue ce 12 novembre 2008 à l'Hôtel de Ville de Paris.
Parmi les 10 nouveaux Justes parmi les Nations dont les figures étaient alors saluées, figurait Charlotte Olinger (2), décédée sans ayant droit. Or le Comité Français pour Yad Vashem avait été plus que favorablement impressionné par les initiatives prises à Erquinghem-Lys en mémoire des juifs et des Justes. De cause à effet...

La Voix du Nord :

- "Mme Olinger...sans descendance. A la demande des frères Saül, la médaille des Justes parmi les Nations a été remise au musée d'Ercan. Viviane Saül, la femme de Gilles-Michel (2), bénévole pour Yad Vashem (3), connaît de longue date Jack Thorpe, président du Musée d'Ercan, et son acharnement à accomplir le travail de mémoire.
"Une avenue d'Erquinghem-Lys porte le nom d'Anne Frank et de deux de ses Justes, l'abbé Vancourre et sa cousine Raymonde Lombart, y ont été honorés", a-t-elle ajouté tandis que Jack Thorpe, dont on sait qu'il installera la médaille en bonne place, remerciait non sans émotion :
"Le musée reçoit ici une distinction suprême." (4)

Publiée en 2006, une brochure de 46 pages illustre sobrement mais de manière très convaincante, ce travail de mémoire mené à long terme à Erquinghem-Lys :


Cette brochure fut éditée à l'occasion de deux manifestations complémentaires :
- l'inauguration de l'avenue Anne Frank, le 14 mai 2006
et
- l'exposition "des Juifs et des Justes" proposée par l'Association "Erquinghem-Lys et son histoire" du 14 mai au 30 juillet 2006 au Musée de la Cité d'Ercan.

6 pages illustrent la destinée d'Anne Frank (5) et des siens, afin que les habitants de l'avenue du lotissement des Acquêts relaient, à leur manière, le souvenir d'une adolescente qui eut le temps et la force de témoigner avant que la Shoah ne l'emporte. Il n'y aura jamais trop de lieux publics gardant et perpétuant son nom qui symbolise toutes les jeunes vies que l'antisémitisme a réduites en cendres dans les camps d'extermination.

Extrait de la brochure : l'avenue Anne Frank. DR.

La même brochure éclaire ensuite sur les personnalités du chanoine Vancourt (1902-1978) et de sa cousine, Raymonde Lombart (1921-1978). Tous deux natifs d'Erquinghem-Lys, ils ont été reconnus Justes parmi les Nations en 1975 déjà.

Raymonde Lombart avait travaillé en usine une année avant que son cousin ne l'encourage à reprendre ses études. Elle décrocha une licence en philosophie à l'Ecole Normale catholique de Loos et entama une carrière de professeur qui se prolongea quatre décennies. A la philosophie, elle joignit des cours de sciences naturelles, tout en se consacrant également au syndicalisme au sein de la CFTC.

Durant la guerre, l'abbé Vancourt et elle n'hésitèrent pas à prendre les plus grands risques non seulement en abritant un futur ministre comme Jean Lecanuet (6), recherché intensivement par la Gestapo, mais aussi des juifs tentant d'échapper à la Shoah.

Témoignage d'Irène Poll :

- "Où fallait-il me cacher ? Je suis retournée à Lille au milieu de la nuit, on m'a cherchée à la gare... On a marché en silence à travers Lille, nuit noire, sans lune... On a sonné, la porte s'est ouverte et refermée derrière nous, une lumière dans le couloir. Je suis face à un prêtre en soutane, Mr l'abbé Raymond Vancourt, et une jeune fille, à peu près de mon âge, Mademoiselle Raymonde Lombart, sa cousine.

En échange de mon étoile et de ma vraie carte d'identité, ils ont obtenu de faux papiers, avec un faux nom, et une fausse date de naissance, et des coupons de ravitaillement. Je me sentais sauvée...
On écoutait la BBC... Les Juifs continuaient à être déportés, on en parlait pas, mais de temps en temps, des Juifs, jeunes filles, et d'autres personnes venaient dans la maison pour quelques jours ou seulement une nuit.

Un jour, ma tante Erlich avec ses deux enfants, Claude et Eliane, arrivent à la maison accompagnés par Mr l'Abbé. Raymonde est allée chercher oncle Charles en faisant un grand détour autour de la ville. Il fallait les cacher. Le lendemain, les Nazis sont allés les chercher dans leur maison pour les déporter... Mr l'Abbé et Raymonde les ont sauvés d'une mort certaine !

Beaucoup plus tard, on m'a dit que Raymonde était allée à la gare de Lille pour recevoir des enfants juifs dont les parents avaient été déportés de Paris. Ces enfants furent ensuite cachés par des familles, en ville ou à la campagne, chez des fermiers ou dans des écoles privées... Et tout cela s'est passé pendant que nous étions cachés dans la maison {rue de la Bassée à Lille}" (7)

Raymonde Lombart donnant cours en 1979. Photo : Brochure. DR.

Extraits du discours du chanoine Vancourt le 17 juin 1975 à Jérusalem, en son nom et en celui de sa cousine :

- "Ce fut un grand honneur pour nous d'avoir été appelés par la Providence à communier, pour une part certes modeste, aux immenses épreuves qu'a connues le peuple juif pendant la dernière guerre mondiale. J'ai toujours considéré, durant ma vie d'homme et de prêtre, qu'un des aspects de mes fonctions était de travailler à diminuer les souffrances des gens que je rencontrais, de leur rendre, dans la mesure du possible, un peu de confiance et de joie. Aussi, quand les circonstances mirent sur notre chemin, à Mlle Lombart et à moi, Mme Diament, Juive allemande en quête de refuge, puis la famille de son oncle et, enfin, une cohorte d'enfants juifs promis au four crématoire, nous ne pouvions avoir, nous n'eûmes pas l'ombre d'une hésitation...

Aujourd'hui, vous voulez nous remercier du peu que nous avons pu faire. De cette délicatesse, nous vous savons gré... Mais je le répète en toute sincérité et du plus intime de mon coeur : l'honneur que nous recevons de votre part aujourd'hui et auquel nous sommes sensibles, ne fait à nos yeux que traduire le très grand honneur qui nous a été imparti de pouvoir redonner un peu de sécurité et de joie à des frères qu'accablait le malheur." (8)

Professeur aux Facultés catholiques de Lille, le chanoine Vancourt plante un caroubier au Mémorial Yad Vashem de Jérusalem. Photo (9) de la brochure (10). DR.

Notes :

(1) Association fondée en 1989. Publiée à l'occasion de l'inauguration du Musée de la Cité d'Ercan, une plaquette de 34 pages présente cette Association dont le site est accessible en cliquant : ICI.
Le Président, Jack Thorpe a remis au blog une abondante documentation en autorisant les reproductions. Qu'il soit remercié ici pour son apport précieux et irremplaçable à la rédaction de cette page.
(2) Page 79 de ce blog. Cliquer : ICI.
(3) Plus exactement, Viviane Saül est déléguée pour les cérémonies du Comité Français pour Yad Vashem.
(4) Voix du Nord. 14 novembre 2008.
(5) Lire la page 8 de ce blog. Lien direct : ICI.
(6) Jean Lecanuet (1920-1993). Professeur de philosophie. Résistant armé. Maire de Rouen. Député puis sénateur. Garde des Sceaux. Ministre d'Etat.
(7) PP 13 et 14 de la brochure.
(8) P. 15 de la brochure.
(9) La brochure a extrait cette photo d'un ouvrage de Marie-Alain Ouaknin et Dory Rotnemer : Le promeneur de Jérusalem, Ed. Ramsay, 1995.
(10) Ont réalisé cette brochure :
- Rédaction : Philippe Demon et Alain Fernagut.
- Traduction : Jack Thorpe.
- Témoignages : Thérèse Lemaire, Berthe Lombart, Irène Poli.
- Composition, mise en page et photos : Philippe Demon et Claire Vandewalle.

Une prochaine page du blog présentera le Musée d'Erquinghem-Lys.

mardi 18 novembre 2008

P. 87. Henri et Marcelle Bagauld, Justes parmi les Nations

(Courtalain dans le passé. DR).

Les parents hélas déportés à Auschwitz,
le petit Roland caché à Courtalain...

Deux juifs, parmi tant d'autres, fuirent les pogroms à répétition de Pologne. C'est ainsi que Gdalia et Etia Khoutman aboutirent à Courtalain en 1936 avec leur petit Roland (né en 1932). Marchands sur les marchés, ils étaient bien connus dans la région, y compris à Châteaudun.

Survient la guerre. Gdalia Khoutman est obligé de pointer chaque semaine auprès des services allemands à Châteaudun. Ceux-ci l'arrêtent le 25 juin 1942. Il sera déporté à Auschwitz (1).

Pressentant la suite des événements, la mère soudain seule, décide de passer en zone dite "libre". Les marchandises destinées aux marchés des environs, sont confiées à des voisins. Le départ est fixé. Trop tard !
Le 10 juillet 1942, à l'heure du laitier, les Allemands viennent s'emparer d'Etia Khoutman (2). Elle n'a que le temps de confier son fils, Roland, à des voisins directs : Henri et Marcelle Bagault. Eux habitent le 20 place Aristide-Briand à Courtalain et les Khouman le 19.

Autant que ses deux filles, Simone et Jacqueline, le couple Bagault va accueillir le petit persécuté, l'entourer d'affection et lui sauver la vie. Il faut ajouter que lui est marbrier et elle chargée des couronnes mortuaires, tous deux veillant donc sur le cimetière municipal.

En février 1944, les Allemands procèdent à d'autres arrestations dans le pays et les Bagault préfèrent alors prendre contact avec une tante du petit Roland. Celle-ci s'est réfugiée sous une fausse identité à Nogent-le-Rotrou. Elle comprend aussitôt la situation et évacue le garçon à Champigny où il finira par vivre les heures de la libération.


Stéphanie Biju (La République du Centre, 8-9 novembre 2008) :

- "C'est la moindre des choses que je pouvais faire !", lance Roland Khoutman. Sur son initiative, la médaille des Justes parmi les Nations sera remise à titre posthume, dimanche prochain, à Marcelle et Henri Bagault qui lui ont sauvé la vie, pendant la Seconde Guerre mondiale à Courtalain.
"Les Bagault ne m'ont pas seulement hébergé ; ils m'ont entouré de toute leur affection", témoigne Roland, soixante-six ans après les faits."

A la cérémonie de Courtalain, le 16 novembre, le Comité Français pour Yad Vashem fut représenté par son délégué Victor Kuperminc.

Notes :

(1) Déportation par le convoi n° 5 du 28 juin 1942. Au départ de Beaune-la-Rolande. 1004 hommes et 34 femmes. Selon Serge Klarsfeld, 55 survivants à la libération.
(2) Convoi n°6 du 17 juillet 1942. Au départ de Phitiviers. 809 hommes et 119 femmes. 45 rescapés à la libération.

P. 86. La "colo" des 10 gosses juifs de Montigny-le-G.

(DR).

La "colonie" de l'instituteur André Baccary
à Montigny-le-Gannelon :
un coin de paix en pleine France vichyste !

Né à Montigny-le-Gannelon, domicilié à Bondy, André Baccary était instituteur à l'école Martel dans le Xe arrondissement. Dans ce quartier, de nombreuses familles juives vont être frappées par la Shoah. Et parmi leurs enfants, ceux confiés à cet institeur vont aussitôt constater que la défaite suivie du triomphe du Maréchalisme, ne vont pas entamer ses convictions d'homme de gauche et d'enseignant républicain.

Quand arrive le temps des rafles, André Baccary avertit les petits juifs de ne pas venir à l'école. Et quand les gosses de plus de 6 ans sont obligés de porter l'étoile de David, il veille à ce que cette marque stigmatisante soit respectée plutôt que raillée en classe.

Mais il faut savoir qu'auparavant, cet instituteur avait déjà pris en pension, chez lui, à Bondy, des gosses de parents juifs.
Orphelin de mère, Pierre Canetti fut le premier pensionnaire dès 1936. Il est rejoint par Henri Bronès en septembre 1939. Puis ce sont les trois Zavaro : Roger, René et Edith qui les rejoignent, leurs parents cherchant à les protéger de la persécution des juifs fin 1942...


Les dangers se précisant, les occupants et leurs collaborateurs de tous poils se montrant de plus en plus tragiquement efficaces, André Baccary et son épouse Clémence, prennent la décision de replier les gosses porteurs d'étoile une colonie de vacances à Montigny-le-Gannelon. Cette colo sympathique avait été ouverte en 1936 par l'instituteur et dans son pays natal. C'est là qu'il proposait de mettre au vert des élèves de son école, gosses de la capitale, le temps qu'ils respirent la campagne et s'y amusent.

Aux cinq enfants venant de Bondy, s'ajoutent cinq autres juifs : Henri Pechtner, Roger Friedmann et Albert, Henri et Renée Osinsky.

Le village va appliquer sans faille la loi du silence sur cette colonie devenue comme un havre de paix en pleine guerre.

L'instituteur continue à assumer ses cours à l'école Martel.
En son absence, sa femme, Clémence, et leur fille Yvonne, animent la colonie.
Aux retours d'André Baccary lors des week-ends et autres congés, il reprend en charge la scolarité des 10 enfants tout en préservant leur sécurité (ainsi par l'établissement de fausses identités pour les petits "clandestins").

Ce 15 novembre, à Montigny, André Baccary et son épouse Clémence sont honorés à titre posthume comme Justes parmi les Nations. Leur fille Yvonne, ne sera pas oubliée, elle qui recevra sa propre Médaille et son Diplôme de Juste.

Le Comité Français pour Yad Vashem sera représenté par son délégué, Victor Kuperminc.

Ces trois Français osèrent cacher dix enfants promis aux chambres à gaz parce que juifs... Leur histoire est comme une lumière sur océan de cendres.


Radio Intensité :

- "Pendant la guerre, un instituteur a caché une dizaine d’enfants juifs à Montigny-le-Gannelon. Ceux-ci se sont retrouvés et se mobilisent pour lui faire décerner le titre de Juste parmi les Nations.
Dans un grand angle, le quotidien Libération revenait sur cette histoire extraordinaire cette semaine et mettait en avant le courage d’André Baccary et son épouse. C’est Henri, l’un des petits garçons juifs sauvés, qui est à l’initiative de cet hommage. Avec deux autres amis, ils sont revenus à Montigny en octobre dernier où ils ont été accueillis par le petit-fils d’André Baccary.

« L’hommage à André Baccary est dans notre cœur depuis toujours. On le porte au fond de nous-mêmes. Nous n’avions pas besoin de le clamer haut et fort. Mais finalement aujourd’hui avec le recul, on se rend compte qu’il a caché dix enfants, leurs parents aussi, Et ça, tout le monde ne l’a pas fait. Il a vraiment risqué sa vie pour sauver les autres», explique Henri."

Claire Béguin (L'Echo républicain, 17 novembre 2008) :

- "Âgée aujourd'hui de 86 ans, Yvonne Baccary-Guillaume a pris la parole, avec un courage exemplaire et d'une voix claire. Fille d'André et Clémence Baccary, elle a également reçu la médaille de Juste parmi les nations. Au moment de l'occupation, elle était âgée de 22 ans :

« Le chemin de la tolérance »

« Papa et maman ont montré le chemin de la tolérance, du respect d'autrui, par l'aide apportée aux juifs injustement poursuivis par l'effroyable politique capable et coupable d'envoyer des innocents vers une mort atroce. Nous savions les risques et les dangers encourus à Paris, les enfants ont été alors cachés à la colonie de vacances mixte "Les enfants au grand air", située à Montigny-le-Gannelon. Mes parents m'avaient intégrée dans leurs missions. Ensemble, nous avons pu sauver celles et ceux qui sont aujourd'hui avec nous, ou en pensées. Des justes parmi les nations il y en a eu, chers parents le nôtre y est inscrit.»

De longs applaudissements ont retenti dans la salle à l'issue de son discours, devant l'assistance, les yeux emplis de larmes et rougis par l'émotion. Le nom des Baccary est aujourd'hui associé à celui des 21 000 personnes qui ont reçu cette haute distinction à travers le monde.

En France, on dénombre près de 3 000 personnes, qui ont été honorés du titre de Juste parmi les nations. Un titre qui a été créé en 1953 par le parlement israélien, la Knesset.
L'un de ses dix enfants sauvés a d'ailleurs fait la demande que la rue Charles-Martel à Paris, où se trouvait l'école où André Baccary était professeur, soit rebaptisée rue Baccary. Christian Aumont, maire (Modem) de Montigny-le-Gannelon s'est lui engagé à baptiser une place du village du nom des Baccary."

A lire : l'article de Philippe Castebon dans Libération, le 12 décembre 2007 : Juste des enfants. Cliquer : ICI.

dimanche 16 novembre 2008

P. 85. Message de Gisèle Prévost, Juste parmi les Nations

Gisèle Prévost :
"Peut-on ne pas se poser la question : à quoi servirait le devoir de mémoire si, aujourd’hui, il ne nous mobilisait pas contre toutes les formes d’exclusion qui sont là, sous nos yeux ?"

Reconnue Juste parmi les Nations et honorée lors de la cérémonie du 12 novembre dernier à l'Hôtel de Ville de Paris lire page 83), Gisèle Prévost a délivré un message nullement passéiste. Que du contraire ! Que le passé, aussi tragique ait-il été, éclaire les consciences pour faire face aux injustices contemporaines.

Gisèle Prévost :

- "Les Justes.

D’abord, merci à Yad Vashem qui a organisé cette journée de reconnaissance. Merci à la famille Gecils qui l’a demandée pour nous.
Dites-vous bien que notre récompense, s’il en était besoin, c’est de vous voir devant nous, ici présents, bien vivants, et de savoir vos parents s’être éteints en paix, chez eux, en France, après la tourmente.

Bien des Justes, célébrés ici ou absents, ont contribué au sauvetage de la famille Gecils :

- D’abord les parents Gecils eux-mêmes.
- Leur père qui, leur appartement mis sous scellés, n’a jamais cessé d’aller chaque jour au travail avec une carte d’identité savamment maquillée pour franchir les barrages de police.
- Leur mère qui a placé en nourrice les deux enfants de 8 mois et deux ans, en grande banlieue, pour les mettre à l’abri. Nous allions de temps en temps les visiter, sans pouvoir les guérir de leur détresse lorsque nous repartions.
- L’employeur de M. Gecils, M. Delage, l’a gardé pendant toute la guerre dans son entreprise. C’est lui qui l’a confié à Jacques Prévost, son ami en résistance, mon époux. C’est dire le rôle actif de la Résistance dans le sauvetage des Juifs, au quotidien et à grande échelle.
- C’est la famille Dupâquier-Maugé qui a pris la relève quand la police vichyste est venue perquisitionner chez nous, et qui a caché les enfants jusqu’à la fin de la guerre.

Mais ce qu’il faut surtout retenir en ce jour, c’est qu’on ne peut, qu’on ne doit pas se contenter de se glorifier d’un passé solidaire.

S’il est un devoir de mémoire de rappeler les crimes de l’Allemagne nazie, le génocide programmé de tout un peuple, de rappeler le courage de ceux qui ont résisté au péril de leur vie, peut-on s’en tenir là ?

Peut-on ne pas se poser la question : à quoi servirait le devoir de mémoire si, aujourd’hui, il ne nous mobilisait pas contre toutes les formes d’exclusion qui sont là, sous nos yeux ?

C’est à vous, nos arrière petits-enfants ici présents, que je parle, regardez autour de vous :

- L’antisémitisme est toujours là.
- Le racisme est partout.
- L’exclusion de Roms et autres minorités ethniques de langue et de culture surgit ici et là.
- Les immigrés de la misère sont traités sans humanité et l’on ouvre pour eux des camps de rétention indignes, comme s’il n’y avait pas d’autres solutions pour réguler les flux migratoires.
- Ghettos et bidonvilles concentrent les plus démunis dans les grandes villes du monde entier.
- Des peuples interdits d’État croupissent dans des camps fermés, tels les Palestiniens.
- Les guerres immondes continuent d’ensanglanter la terre.
- Enfin, des millions d’enfants innocents meurent de faim, de misère, aussi nombreux que les victimes des camps de concentration dans la guerre de 1940-45. Pour ceux-là, c’est l’exclusion absolue : ils n’ont accès ni au pain, ni au savoir, ni au pouvoir.

Alors demandons nous : qu’est-ce que « être un Juste » aujourd’hui, sinon se dresser contre l’injustice, s’engager au côté des victimes, modestement, dans le quotidien, à l’école, dans la rue, au travail, militer pour construire un monde meilleur ?

Quelle tache immense vous attend, vous qui serez les Justes de votre temps, les Justes d’aujourd’hui !

Je vous espère et je vous salue."


NB : Cet appel et ce salut de Gisèle Prévost ont été déposés sur le blog par Viviane Saül, déléguée du Comité Français pour Yad Vashem.

vendredi 14 novembre 2008

P. 84. "Ce que les Justes ont évité à la France, c'est la perte intégrale de sa propre identité."

Discours d'Anne Hidalgo,
Première adjointe au Maire de Paris,
ce 12 novembre
lors de la cérémonie de reconnaissance
de 10 Justes parmi les Nations

Anne Hidalgo : "Malgré les périls et la mort, omniprésente, les Justes ont choisi l'honneur." (Photo DR)

- "Mesdames et Messieurs,

C’est un honneur pour moi de vous accueillir dans la maison des Parisiens, pour une cérémonie qui nous remémore la catastrophe mais surtout l’étincelle d’humanité qui sut la traverser sans défaillir.

Voilà soixante ans à peine, la plus terrible et atroce coalition de la haine et de l’indifférence a voulu conduire à la mort et à l’oubli des millions d'êtres. Ici, dans notre vieille Europe aux gloires délicates, ici, au cœur de Paris, dans ce refuge devenu piège qu’était le quartier du Marais, les Juifs furent traqués et condamnés à disparaître de la communauté humaine.
La barbarie nazie et la complicité de l’Etat français s’étaient conjuguées pour détruire des millions de vies et annihiler leurs mémoires. Par ce crime, c'est notre civilisation tout entière qui voyait s'effondrer les piliers de sa propre existence.

Depuis, le souvenir de ce peuple martyr nous hante, présent comme une menace. Ils sont partis dans l'enfer des camps et aujourd'hui, ils nous observent de ce regard que décrivait Albert Cohen : "avec ces tristes yeux qui savent, ces yeux élargis par l'épouvante, ces yeux ouverts sur le néant".

La France a alors perdu une part de son âme. Complice de l'indicible, elle a livré ses propres enfants.
Elle les a abandonnés, eux qui avaient tant cru en elle, ayant ici, selon le mot de l'abbé Grégoire, "reposé leurs têtes et séché leurs larmes". Ici, dans cette ville séculaire dont le nom exalte à lui seul l'idée même de Liberté, le pire s'est produit.

Ce que les Justes ont évité à la France, c'est la perte intégrale de sa propre identité. Ce qu’ils nous ont transmis est un message essentiel, pour aujourd’hui et pour demain : le refus de l’indifférence, de l’aveuglement. L’affirmation dans les faits que les valeurs ne sont pas des principes désincarnés, mais qu’elles s’imposent quand une situation concrète se présente et que l’on sait ouvrir les yeux.

Je veux dire mon admiration pour cette capacité, magistrale, à demeurer debout, dignes, lucides, au plus dur des années sombres, quand se prolongeait un cauchemar insoutenable anesthésiant les sens, invitant au renoncement.
Malgré les périls et la mort, omniprésente, les Justes ont choisi l'honneur.

Jacques et Gisèle PREVOST, Elisabeth et Pierre MAUGER, que nous honorons ce soir, ont protégé Paule et Pierre GECILS, à l’aide de la famille DUPÂQUIER. Charlotte OLINGER, Jules-Henri PROQUITTE, Fernand et Lucie LAIGNEAU, Lucien et Elise PERTHUIS, tous ont vu dans le visage des Juifs persécutés la souffrance de leurs frères humains.
Grâce à eux, grâce à tous les Justes, les trois quarts des Juifs de France furent sauvés, alors que les trois quarts des Juifs d'Europe ont péri.

La présence et le souvenir des Justes incarnent l’essence même de l’homme : le libre arbitre. La liberté de choisir entre le bien et le mal, selon sa conscience. Le courage est toujours possible. Il n'y a jamais d'excuse valable pour la lâcheté ou l'indifférence.
Ce que j'ai fait, nous disent les Justes, c'est aider quelqu'un qui avait besoin de moi. Ce que j'ai fait, c'est tout simplement me comporter en être humain. Ce que j'ai fait, n'importe qui aurait pu le faire. N'importe qui aurait dû le faire.
Cette exigence, nous devons la garder vivante. Telle est la leçon de ces années noires : si l’on transige avec ce qui menace la dignité humaine, on lui offre un terreau pour prospérer et, tôt ou tard, on en paye le prix.

Je ne voudrais pas terminer ce propos sans évoquer avec force l’otage Gilad SHALIT. J’ai reçu récemment son père à l’Hôtel de Ville : cet homme brisé mais déterminé nous rappelle que les luttes contre le fanatisme sont actuelles et nécessitent une vigilance et une mobilisation de tous les instants. De même, l’antisémitisme n’est pas vaincu : partout, et récemment encore à Paris dans le 19ème arrondissement, ses relents se font jour.

Pour tous ces engagements, suivons le modèle des Justes : ils ont fait le choix de la fraternité et de la solidarité. Inspirés par eux, ne cédons jamais au désespoir et au renoncement. Aux plus jeunes générations, transmettons sans relâche l’enseignement des Justes. Restons lucides. N’oublions jamais."

NB : Remerciements à Viviane Saül, déléguée du Comité Français pour Yad Vashem, pour la transmission des documents relatifs à cette cérémonie en l'Hôtel de Ville de Paris.



mardi 11 novembre 2008

P. 83. Les Justes qui ont sauvé les petits Gécils


Paule et Pierre Gécils n’ont jamais oublié qu’ils doivent la vie au courage et au dévouement des familles Prévost, Dupâquier et Mauger.

Alors que se dépandent des rumeurs de suppression de la Journée nationale des Justes de France (pour cause de "communautarisme" ?!?), dix nouveaux Justes parmi les Nations sont honorés ce 12 novembre à l'Hôtel de Ville de Paris.
A propos de cette cérémonie exceptionnelle (mais elles le sont toutes, quels que soient les noms de ces Justes, leur nombre et le cadre de l'hommage ainsi rendu), veuillez aussi consulter les pages 79 à 82.

Alors que la Shoah devait et voulait les emporter, voici comment les petits Gécils y échappèrent grâce à des Français aussi désintéressés que modestement héroïques :

- "Rachmiel Gécils, né en 1908 dans le quartier juif de Vilnus, quitte la Lithuanie pour la France en 1933, fuyant l’antisémitisme.
Laja Gurfinkiel, née en 1907 dans le ghetto de Varsovie, d’une famille de 11 enfants, fuit la misère et l’antisémitisme pour arriver à Paris dans les années 30, après avoir séjourné en Belgique avec sa sœur.
Une société de jeunes juifs originaires d’Europe de l’Est permet leur rencontre. Ils se marient en 1938.
Le jeune couple s’installe dans un petit appartement au 38, rue d’Hauteville, Paris 10 ème. Rachmiel est peintre en bâtiment, peintre en lettres et dessinateur.


Dans la France occupée, leur fils Pierre naît le 31 décembre 1941. Les lois anti-juives ont commencé à sévir, et les Gécils sont identifiés comme juifs avec le tampon rouge apposé sur leurs papiers d’identité.
Survient la rafle du Vel d’Hiv en juillet 1942. La famille est sauvée une première fois grâce à une femme de policier, résistante, venue les prévenir.


A cette époque, Rachmiel, grâce à ses talents de dessinateur, parvient à maquiller le tampon JUIF sur leurs cartes d’identité.
Mais leurs ressources sont réduites et il s’agit de faire vivre la famille. Par chance, un entrepreneur lié à la Résistance, Monsieur Delage, embauche Rachmiel malgré les risques.
Nous sommes en 1943, la petite Paule Gécils vient au monde le 6 juin. Si bien que cette famille en péril comporte à présent deux jeunes enfants.
De plus, ils trouvent un soir leur appartement sous scellés. Les voilà à la rue, à la merci de tous les dangers.
Le père prévient alors son employeur, Monsieur Delage, qui n’hésite pas un instant. Il s’adresse à un autre jeune résistant, Jacques Prévost, marié et père de deux petits enfants. Celui-ci cherche immédiatement un refuge sûr pour cette famille en détresse, au mépris du danger pour lui-même et les siens, associant à ce sauvetage sa femme Gisèle.

Les Prévost habitent un petit appartement au rez-de-chaussée à Boulogne S/Seine et disposent d’une chambre de bonne au dernier étage. C’est là qu’ils installent provisoirement la famille Gécils, faisant preuve d’un humanisme exemplaire. Ils organisent la vie de leurs protégés, si bien que Monsieur Gécils peut continuer à travailler toujours avec ses papiers falsifiés.
Toutefois le voisinage n’est pas sûr et la situation est précaire.

Gisèle Prévost accompagne Laja à la recherche d’une solution. Mais les nourrices sont douteuses, et les bombardements alliés sur les usines Renault sont dangereux.
Gisèle Prévost est amenée à quitter Boulogne pour assurer la sécurité de ses deux enfants, laissant son mari chercher une nouvelle solution pour la famille Gécils.

Il trouve de l’aide auprès de Jacques Dupâquier, étudiant, fervent militant s'opposant à l’antisémitisme. Celui-ci accepte immédiatement d’aider cette famille en grand danger. Madame Dupâquier, sa mère, participe au sauvetage des deux petits enfants juifs. Il est convenu que cette femme admirable, viendrait à Paris chercher les deux enfants, se prétendant leur grand-mère, pour les accompagner en Seine Maritime, et les confier à sa belle-sœur et à son neveu, Elisabeth et Pierre Mauger.

Chez les Mauger, les deux petits, perturbés par tous ces bouleversements, trouvent un accueil chaleureux. Mère et fils veillent sur leur sécurité. Ils les traitent et les présentent comme des membres de leur propre famille. Ils les protègeront ainsi jusqu’à la fin de la guerre, tandis que Jacques Dupâquier assurera la protection de leurs parents, tout en rendant avec sa mère, de fréquentes visites aux enfants.

L’amitié forgée au cours des années noires, entre les Gécils et leurs sauveurs, restera indestructible. Mais après les années 60, la vie les séparera durant une longue période.
Des retrouvailles après 40 ans grâce à Internet seront source
d’une très grande émotion et de l’hommage rendu aujourd’hui à des personnes admirables."

La cérémonie du 12 novembre est placée sous la responsabilité de deux déléguées du Comité Français pour Yad Vashem : Madeleine Peltin-Meyer et Viviane Saül.

Au nombre des personnalités qui ont voulu la rehausser de leur présence, sont annoncés : Bertrand Delanoë, Maire de Paris; Anne Hidalgo, Première adjointe; Catherine Vieu-Charier, Adjointe au Maire, chargée de la Mémoire et du Monde combattant; Me Corinne Champagnez-Katz, Présidente du Comité Français pour Yad Vashem.

Jacques et Gisèle Prévost recevront leurs médailles et diplômes des mains de l'Ambassadeur d'Israël, son excellence Daniel Shek.
Elizabeth Mauger et son fils, Pierre, seront honorés à titre posthume.

NB : Remerciements à Viviane Saül, déléguée du Comité Français, pour la synthèse présentée ci-avant.
Veuillez prendre connaissance ci-après du témoignage envoyé depuis Los Angeles par Nathalie Gallmeier (Gécils), fille de Pierre Gécils. Lire : "commentaire".

P. 82. Quand la famille Perthuis prenait tous les risques pour la famille Prezman

Lucien et Elise Perthuis, Justes parmi les Nations...

Hommage qui leur sera rendu, le 12 novembre, à l'Hôtel de Ville de Paris :

- "Nous sommes en 1931. Golga Jablonka et Samuel Prezman fuient Varsovie où sévissent l’antisémitisme et la crise économique, pour se réfugier en France. Ils s’installent dans un deux pièces, au 16, Cité Popincourt, dans le 11ème arrondissement. Leur fille Suzanne naît en 1932, puis son frère Gabriel.
Les Prezman entretiennent d’excellentes relations avec leurs voisins de palier, les Perthuis, dont le fils Roger est étudiant en droit.


Survient la rafle du 16 Juillet 1942. La veille, un agent de police qui habite la Cité, inquiet d’avoir été réquisitionné cette nuit-là, comme tous ses collègues, a le courage de prévenir les Prezman. Aussitôt, une chaîne de solidarité se met en place. Suzanne et sa tante sont hébergées chez une amie. Les parents se réfugient dans leur atelier, Gabriel, chez un ami de classe. La nuit est mouvementée, troublée par des cris et des pleurs.
Le lendemain le calme semble revenu. Les Perthuis recueillent la famille Prezman. C’est alors que la police française revient les chercher vers midi.
Lucien Perthuis sort sur le palier, laissant la porte ouverte. Il se plaint de n’avoir pu dormir à cause du bruit et déclare qu’il ignore où se trouvent les Prezman, partis en vacances depuis huit jours, alors qu’en réalité ils étaient cachés sous son lit.
Le risque était grand pour lui et sa famille, mais il n’a pas flanché.

Depuis ce jour, jusqu’à là Libération, et même après, Elise et Lucien Perthuis n’ont jamais cessé d’aider et de secourir les Prezman.
Dans un très beau témoignage, Madame Jeanne Perthuis, épouse de leur fils Roger, nous rappelle que ce jour-là, tous les juifs sauvés l’ont été grâce à des non juifs, qui ne se sont pas pris pour des héros, mais pour des humains.

Il s’agissait donc de mettre en sécurité la famille Prezman en la dispersant, ce que les Perthuis ont pris en charge. Différents logements ont été trouvés pour leurs protégés, grâce à Lucien Perthuis qui prenait en outre le risque de chercher les tickets de rationnement pour les Prezman et de les leur apporter chaque mois.
De plus dans un climat de confiance totale, Samuel Prezman lui avait confié toutes ses économies. Si bien qu’il leur remettait à chaque visite ce qui leur était nécessaire.

La protection de Suzanne était assurée par Madame Perthuis qui l’avait placée dans un institut catholique de jeunes filles à St-Mandé, se chargeant elle-même de régler sa pension et de se déclarer responsable pour elle. Seule la Directrice savait que cette élève était juive. Là encore, Elise Perthuis prenait de grands risques.
De temps à autre, Suzanne rendait visite à ses parents dans un petit appartement loué à Joinville sous un faux nom.

Pendant cette affreuse période, les appartements des juifs, pillés et vidés de leur contenu, étaient reloués.
Mais Monsieur Perthuis n’était jamais à court d’astuces. S’introduisant par une fenêtre chez les Prezman, il y répandit des monceaux de détritus, si bien que tous les candidats se découragèrent.
Ainsi, grâce à la précieuse amitié des Perthuis, la famille Prezman put réintégrer son appartement après la libération, mais il était vide.
Qu’à celà ne tienne, leurs bienfaiteurs les aidèrent à nettoyer les lieux, et avec leur générosité habituelle, leur fournirent les meubles et objets de première nécessité.

La reconnaissance des Prezman et les relations d’amitié entre les deux familles ont perduré jusqu’à la disparition des uns et des autres.
Actuellement, Suzanne Prezman est toujours amie avec Corinne Perthuis, la petite-fille de nos deux héros, Elise et Lucien Perthuis."

Cette cérémonie de reconnaissance de 10 nouveaux Justes parmi les Nations est annoncée des pages 79 à 83 de ce blog. Elle aura pour cadre prestigieux l'Hôtel de Ville de Paris.

NB : Tous nos remerciements à Viviane Saül, déléguée du Comité Français pour Yad Vashem, qui a confié au blog les hommages de cette cérémonie.


lundi 10 novembre 2008

P. 81. Jules-Henri Proquitte, Juste parmi les Nations

(Invitation de la Mairie de Paris et du Comité Français pour Yad Vashem à la cérémonie du 12 novembre 2008)

Comment Maurice Mann fut arraché à la Shoah.

10 Justes ont leurs noms attachés à la cérémonie de remises de diplômes et de médailles de Justes parmi les Nations, le 12 novembre à la Mairie de Paris.
Voici la synthèse de l'hommage rendu à Jules-Henri Proquitte.

- "La famille Mann habitait 27, rue du Château d’eau, dans le 10e. Sous le même toit vivaient la grand-mère, le père et la mère, leur fille Anne, âgée de 23 ans, et son jeune époux Etienne Rosenfeld, ainsi que Salomon 16 ans, Maurice 14 ans, et leur cousine Suzanne 13 ans, recueillie lorsque ses parents furent arrêtés en 1942.

Maurice Mann raconte la sombre période où, à 12 ans, il dût porter l’étoile jaune se faisant traiter de "sale juif", et aussi où une bibliothécaire compatissante dut refuser, les larmes aux yeux, de lui prêter un livre.

Les parents étaient forains, mais bientôt il leur fut interdit d’exercer. La famille dut vivre du troc de tickets d’alimentation et de la maigre paie de ses enfants.

Le 23 mars 1944, Il est 8 heures du matin. Deux policiers en civil se présentent pour arrêter la famille. Mais la grand-mère est impotente, et les parents protestent vivement. Si bien que les policiers la laissent. Elle reste seule.
Pendant cette altercation, Salomon, Maurice, et leur cousine Suzanne, s’échappent par la fenêtre. Ils sont au premier, juste au-dessus de la verrière d’une usine, dont les employés se précipitent pour les aider, en ouvrant le passage qui débouche sur la rue de Bondy.
Malheureusement, Madame Mann rappelle son fils qui disposait d’un laissez-passer pour se rendre à son travail, croyant que ce document pourrait les sauver tous. Ce fut peine perdue, et Salomon fut également arrêté.

Maurice et sa cousine rejoignent la grande sœur qui travaille à Clamart. Celle-ci prend courageusement la situation en main. Risquant sa vie, elle retourne chercher sa grand-mère et parvient à la placer dans une maison de retraite de l’hôpital Rothschild. Lui cachant le triste sort de la famille, elle lui fera croire au retour de ses enfants jusqu’à son décès en mars 1945.
Par ailleurs, le jour même de l’arrestation de sa famille, elle avait pris contact avec une personne liée à la Résistance. Celle-ci lui donna l’adresse d’une concierge qui les hébergera pour la nuit, accepta de recueillir Suzanne, et leur indiqua l’adresse de Monsieur Proquitte.

Sans hésiter, et au mépris du danger pour lui-même, son épouse et son fils, Jules-Henri Proquitte accepta généreusement d’accueillir Maurice Mann, le traitant comme un membre de la famille, en attendant de le faire passer en zone libre. Ce qui se produisit en mars, où Maurice fut envoyé dans un château de la Croix-Rouge en Haute-Savoie, le château des Avesnières où il resta sans problème sous un faux-nom jusqu’à la Libération, en mai 1945.

A son retour à Paris, Maurice n’a pas manqué de témoigner sa reconnaissance à son bienfaiteur, Jules-Henri Proquitte, à qui il doit la vie.
Devenu orphelin, il a vécu chez sa sœur et son beau-frère, a travaillé d’arrache-pied, puis il a fondé une famille."

NB : Synthèse transmise par Viviane Saül, déléguée responsable de la cérémonie, avec Madeleine Peltin-Meyer.


P. 80. Deux Justes de Crucey-Villages


Comment Fernand et Lucie Laigneau
ont sauvé le petit Joël Krolik

10 Justes parmi les Nations sont honorés à l'Hôtel de Ville de Paris le 12 novembre. Dans ce cadre historique, la cérémonie est placée sous la responsabilité de deux déléguées du Comité Français pour Yad Vashem : Madeleine Peltin-Meyer et Viviane Saül.

Au nombre des personnalités présentes, se distinguent Bertrand Delanoë, Maire de Paris; Anne Hidalgo, Première adjointe; Catherine Vieu-Charier, Adjointe au Maire, chargée de la Mémoire et du Monde combattant; Me Corinne Champagnez-Katz, Présidente du Comité Français pour Yad Vashem; Daniel Shek, Ambassadeur d'Israël en France.

Un couple de Crucey-Villages recevra à titre posthume les diplômes et médailles de Justes parmi les Nations. Ceux-ci furent amplement mérités comme le prouve cette synthèse :

- "En 1932, Leijzer et Pesa Krolik arrivent de Varsovie avec leur fils Joseph, né en 1931, et s’installent dans un modeste deux-pièces, au 83, rue de Belleville à Paris 11ème. Le père est tailleur à façon, son épouse l’aide dans son travail.
Ils auront trois autres enfants. Joël en 1931, Rosette, en 1934, Annette, en 1936.


La guerre éclate. Leijzer s’engage dans la légion étrangère pour défendre la France. La famille se réfugie dans la Sarthe. Six mois plus tard, c’est la capitulation. Les Krolik retournent rue de Belleville.

En 1941, Leijzer échappe à une rafle qui vise les hommes juifs. Il se cache sous un lit.

Mais en juillet 1942, c’est la rafle du Vel d’Hiv, et les familles entières sont arrêtées. C’est alors qu’une voisine au grand cœur, Madame Cubayne, cache les Krolik chez elle durant une quinzaine de jours, prenant de grands risques pour elle-même. Entre temps la petite Rosette, 8 ans, a été envoyée à la campagne.
Dans l’immeuble la chaîne de solidarité s’organise. Monsieur Arnoult, qui tenait une échoppe de bottier au rez-de-chaussée, prend en charge, avec son épouse, la famille Krolik. Il cache Joël chez ses parents à Savigny S/Orge, après un voyage en train des plus périlleux, et forme le projet de mettre en sécurité le reste de la famille.

Hélas, il ne peut réaliser le sauvetage prévu, et doit annoncer à Joël l’arrestation de ses parents, de sa sœur Annette, et de son frère Joseph. Aucun d’eux ne reviendra de déportation.

Monsieur et Madame Arnoult, nommés Justes en 1994, poursuivent leur œuvre de solidarité. Il s’agit de mettre Joël en lieu sûr. En novembre 1941, la situation est devenue délicate à Savigny S/Orge. Monsieur Arnoult ramène Joël à Paris et le confie à Madame Cubayne, la fidèle voisine, qui l’accompagne en Eure et Loir à Crucey, chez Fernand et Lucie Laigneau, couple sans enfants qui exploite une ferme.

Joël, totalement dépaysé, est accueilli chaleureusement par les Laigneau et par leur nièce Denise Louvet, qui vit avec eux. Il passe pour un neveu venu de Paris pour raison de santé, et ne doit surtout jamais dire qu’il est juif. De plus, des cachettes sont préparées en cas de visite de gendarmes.

Joël est traité par ses bienfaiteurs comme un membre de la famille. Il fréquente l’école du village où l’institutrice est complice, et participe aux travaux de la ferme. Sa réussite au certificat d’études en juillet 1943 les rend très fiers, si bien que tous les voisins défilent chez eux pour les féliciter.
Joël ne peut risquer de fréquenter le collège. Aussi, durant un an et demi, il prend goût à la vie de petit paysan et s’attache de plus en plus à ses protecteurs.

Les Laigneau ne se contentent pas de secourir Joël. Durant cette période, ils ont caché une autre famille juive en grand péril. Madame Saks et ses trois enfants. Lucienne, 10 ans – Maurice, 8 ans – Suzanne, 6 ans. Les traitant avec une égale bonté et les protégeant jusqu’à la Libération.
Il s’en est suivi de durables liens d’amitié entre les deux familles.

Les risques encourus par les Laigneau étaient énormes, car la police de Vichy et les allemands passaient souvent dans le village à la recherche de résistants. On utilisait alors les cachettes prévues à cet effet.
.
Nous sommes en novembre 1944. Paris est libéré. Et comme un bonheur n’arrive jamais seul, les Laigneau attendent un heureux évènement. Leur fils Christian est né en janvier 1945.
Il est temps pour Joël de prendre le train pour Paris. Il doit quitter ses sauveurs et c’est pour lui un grand déchirement. Il a 13 ans et demi et il est placé dans des foyers pour enfants de déportés, où il aura la joie de retrouver sa sœur Rosette.

Joël Krolik a gardé une indéfectible reconnaissance pour des personnes admirables, qui, avec un inlassable dévouement, lui ont sauvé la vie."

NB : Remerciements à Viviane Saül pour l'aide apportée à la rédaction de cette page.

mardi 4 novembre 2008

P. 79. Charlotte Olinger, Juste parmi les Nations

Souvenirs de Gilles Saül
orphelin de parents déportés à Auschwitz
et enfant caché par Charlotte Olinger

Le 12 novembre, dix nouveaux Justes parmi les Nations seront publiquement honorés à la Mairie de Paris. Au nombre de ces Français qui, au risque de leur vie, ont sauvé celles de juifs persécutés :
Charlotte Olinger.

Gilles Saül a accepté d'expliquer, pour ce blog, comment la Shoah l'a privé de ses parents mais aussi pourquoi il a intensément souhaité que Charlotte Olinger puisse porter le titre amplement mérité de Juste parmi les Nations.

Isaac Saül (Photo : arch. fam. G. Saül).

20 août 1941 (1) :

- "Vers 8h du matin, mon père, Isaac Saül (2) est prêt à se rendre au magasin. Il porte déjà son chapeau sur la tête. On sonne. Deux inspecteurs français en civil et un Allemand en uniforme !
Mon père va être enfermé à Drancy, le camp venant tout juste d'être ouvert. Quelques temps après, il est transféré à Compiègne.

Nous vivions alors toute la famille boulevard de Belleville : Isaac, mon père, Sarah Frandjy (3), ma mère, les trois garçons, Gilles, Albert et Henri, ainsi que notre grand-mère paternelle qui se prénommait elle aussi Sarah. Sitôt après cette arrestation inattendue, ma mère et ma grand-mère décident de se séparer par mesure de sécurité."

La Grand-Mère Sarah (Photo : arch. fam.).

- "S'abritant dans une chambre à Menilmontant, ma grand-mère retrouve néanmoins sa belle-fille pour tenter de prendre des nouvelles de mon père à Drancy. Celui-ci était alors apatride, mais d'origine turque. En fait, dans les années 20, il avait abandonné, avec ses deux frères, la Turquie dans laquelle venait de triompher la révolution d'Atatürk. Avec pour conséquence, pour les Juifs, de devoir accomplir un service militaire qui leur avait été épargné jusque-là.
Mon père avait alors gagné la France. Il travaillait dans le Sentier, rue du Caire, à Paris où se détachait une enseigne au nom de la famille Saül.


Ma grand-mère Sarah, qui avait une force de caractère remarquable, n'hésite pas à demander à être reçue par l'ambassadeur de Turquie à Paris. Elle lui prouve, certificat à l'appui, que son mari est mort en 1917 sous l'uniforme turc, celui d'une armée qui était alors alliée des Allemands. Et à force de persuasion, elle décroche un certificat par lequel mon père est déclaré de nationalité turque... Donc doit être libéré.
Hélas, quand ma grand-mère se précipite à Drancy, mon père a déjà été embarqué dans le convoi n°1 du 27 mars 1942." (4)

8 juillet 1944 (5) :

- "Ma mère et ses trois fils passent à travers les grandes rafles suivantes (je suis né en 1935, Albert en 1938 et Henri en 1940).
Néanmoins, je me souviens qu'au printemps 1942, Albert et moi, avions été cachés dans une institution religieuse de la périphérie de Paris. Puis à Vernonnais dans l’Eure où j'étais fasciné par le poste à galène des personnes qui nous hébergeaient.
Comme les dangers semblaient être écartés, nous sommes revenus près de ma mère."

Les trois frères Saül, de g. à dr. : Albert, Henri et Gilles (Photo : arch. fam.).

- "Ma grand-mère Sarah, qui avait une connaissance à la Préfecture de Police de Paris, nous prévint la veille du 8 juillet 1944 de ne surtout pas ouvrir la porte en cas de visite et de rester totalement silencieux, car des arrestations étaient prévues.
Le 8 juillet à 8h du matin, la sonnette retentit. Ma mère ne pense pas que c’est la Police. Par contre elle attend l'encaisseur du gaz et de l'électricité et n'a pas envie que ceux-ci nous soient coupés.
Quand elle ouvre, deux inspecteurs de police attendent devant la porte. Ils viennent pour nous arrêter tous les quatre.
Alors, je n'oublierai jamais.
Ma mère s'est jetée à leurs pieds. Elle les a suppliés de ne pas emmener ses enfants.
Ils ont demandé chez qui elle allait nous laisser ? Ma mère leur a répondu qu'une voisine pouvait s'occuper de nous.
Ma mère a été déportée pour Auschwitz par le dernier convoi parti de Drancy" (6).

Sarah Saül-Frandjy (Photo : arch. fam.).

Charlotte Olinger :

- "Ma mère emmenée par les policiers français, la voisine prévient aussitôt ma grand-mère. Sans tarder, elle fait appel à son fils David, le frère cadet de mon père.
Celui-ci possède de faux papiers d'aryen et bénéficie même d'un ausweiss. Il nous emmène sans tarder, Albert et moi, vers La Ferté sous Jouarre (Seine et Marne) où il est certain de pouvoir nous mettre à l'abri dans une ferme.
Voilà pour la théorie. car concrètement, notre train se trouve pris dans un bombardement anglais. Les voies sont coupées. Impossible d'aller plus loin.
Nous continuons à pied par la première route venue. Il nous laisse sous un arbre, et nous demande de l'attendre. Il va revenir rapidement...

Quand il est de retour, il nous dit qu’il a trouvé dans le village de Luzancy (Seine et Marne) une dame qui va nous garder.
Déjà veuve avant guerre, Madame Olinger, va nous gâter, et nous choyer. Elle savait pertinemment que nous étions Juifs !"

Charlotte Olinger (Photo: arch. fam.)

- "C'était une grande Dame ! Elle nous a sauvé la vie, à nous petits orphelins...
Ma volonté de la voir reconnaître comme Juste parmi les Nations aboutit enfin à l’Hôtel de Ville de Paris ce 12 novembre 2008. Madame Olinger est décédée sans descendance et sans ayants droit. Des propriétaires actuels de sa maison, le moins que l'on puisse dire, c'est qu'ils sont insensibles si pas hostiles à l'histoire de notre sauvetage par cette magnifique Juste parmi les Nations." (7)

Les suites de la cérémonie du 12 novembre, dans La Voix du Nord et sous la signature de M-Claude Guillemet:

- "Mme Olinger a toujours eu le souci de les aider, jusqu'en 1973, année de son décès. « J'ai le souvenir d'une femme qui nous a donné les attentions d'une mère. Elle a réussi à nous persuader que nous étions en vacances ! Nous lui sommes reconnaissants à tout jamais de nous avoir sauvé la vie », a avoué l'aîné des frères.

Sans descendance, et à la demande des frères Saül, la médaille des Justes parmi les Nations a été remise au musée d'Ercan (8). Viviane Saül, la femme de Gilles-Michel, bénévole pour Yad Vashem, connait de longue date Jack Thorpe, président du musée d'Ercan, et son acharnement à accomplir le travail de mémoire. « Une avenue d'Erquinghem-Lys porte le nom d'Anne-Frank et deux de ses Justes, l'abbé Vancourre et sa cousine Raymonde Lombart, y ont été honorés », a-t-elle ajouté, tandis que Jack Thorpe, dont on sait qu'il installera la médaille en bonne place, remerciait non sans émotion : « Le musée reçoit ici une distinction suprême »." (VdN 14 novembre 2008)

Notes :

(1) 3022 arrestations pour le seul 20 août 1941. Une précision encore : mon père avait été engagé volontaire lors de la déclaration de la guerre.

(2) Isaac Saül, né en 1906 à Smyrne, Turquie.

(3) Sarah Frandjy, née en 1912 à Salonique, Grèce. Mariée à Paris avec Isaac Saül (le 10 novembre 1928).

(4) Convoi n° 1 : 1146 déportés, 23 rescapés en 1945.

(5) Sur le registre de Drancy au 8 juillet 1944 : 12 entrées suite à des arrestations par la Préfecture de Police.

(6) Convoi n° 77 du 31 juillet 1944 : 1.300 déportés, 214 survivants en 1945.

(7) Souvenirs recueillis le 26 octobre 2008.

(8) Une future page de ce blog sera consacrée à ce Musée.

Remerciements à Gilles ainsi qu'à Viviane Saül pour cette page du blog (témoignage et illustrations).