mercredi 4 juin 2008

P. 44. Gratitude envers les Justes et poème aux parents déportés

En complément des pages 42 et 43 présentant un compte-rendu de la cérémonie de reconnaissance de 7 Justes parmi les Nations, ce 2 juin à la Mairie du 3e Arrondissement de Paris,

voici le discours prononcé par Peleg Lewi, Conseiller près l'Ambassade d'Israël à Paris :

"Monsieur le Maire,
Madame la Présidente du Comité français pour Yad Vashem,
Monsieur le Vice-Président du Comité français pour Yad Vashem,
Mesdames les Déléguées régional du Comité français pour Yad Vashem,
Mesdames et Messieurs,


En janvier 2007, la France a rendu un vibrant hommage aux Justes parmi les Nations. Jacques Chirac, alors Président de la République, et Simone Veil, Présidente de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah ont introduit les Justes de France au cœur du Panthéon. Toute la France a été touchée par la reconnaissance enfin étalée au grand jour de ces héros ordinaires.
Entre 1940 et 1945, la France traverse la période la plus sombre de son histoire. Elle a capitulé devant l’Allemagne nazie et les Juifs sont fichés, pourchassés comme des bêtes, raflés et persécutés.
La barbarie nazie est une machine de mort infernale, minutieuse, qui ne laisse rien au hasard. Personne n’est épargnée : hommes, femmes, enfants et vieillards.
Plus de 76.000 Juifs - un quart de la population juive en France - ne pourront échapper à un destin tragique et seront exterminés dans les camps de la mort.
Six millions de Juifs en Europe seront ainsi assassinés dans ce qui constitue le plus grand crime industriel de l’histoire de l’humanité.

La période est sombre. La France connaît ses collaborateurs, de triste mémoire, qui non seulement aident les nazis, mais parfois même les devancent dans leur entreprise. La France, c’est encore une grande majorité silencieuse et passive, parfois par indifférence, souvent par peur.
Mais la France, c’est aussi de merveilleux éclats de lumières qui naissent de l’obscurité. Alors qu’ils pouvaient fermer leurs yeux, passer en silence, ils ont été happés par le drame et se sont mis en danger de mort, eux et leur famille, pour sauver des Juifs.
Ils l’ont fait avec toute leur âme, tout leur cœur. Certains y ont laissé leur vie.
C’est vrai que les Justes considèrent que ce qu’ils ont fait était naturel, qu’il n’aurait pu en être autrement, et même qu’ils auraient dû en faire plus. Mais on voit bien que les Justes n’ont pas seulement sauvé des innocents d’une mort certaine, muraille contre la barbarie ; ils ont sauvé la dignité de l’homme, ils ont sauvé l’honneur de la France.
Le Talmud va même plus loin, quand il dit : « Qui sauve un homme sauve l’humanité entière ».

Le peuple juif n’oublie pas.
Ni les bourreaux et leurs collaborateurs. Ni ces Justes, êtres exceptionnels, lumières des nations.
Ils nous rappellent que le courage se trouve bien souvent hors des idées reçues partagées par la majorité.
Il incombe à tous de préserver le souvenir précis de cette tragédie humaine. Pas seulement pour la mémoire des morts sans sépultures. Pas uniquement pour honorer les Justes, ces perles de l’humanité. Mais aussi pour préserver notre avenir à tous. La mémoire est un outil indispensable à l’homme pour se construire dans le futur.
On ne bâtit rien sur l’oubli ou le mensonge.

La Médaille des Justes parmi les Nations est la plus haute distinction de mon pays, il ne s'agit ni d'une récompense, ni d'une décoration mais simplement d'un témoignage de gratitude et de reconnaissance éternelles.
C’est avec un très grand honneur et une immense émotion que je la remets aujourd’hui au nom du peuple juif et de l’État d’Israël.
Chers Justes, nous vous sommes à jamais reconnaissants de ce que vous avez accompli au péril de votre vie.
C’est ce qui nous donne encore la force de croire en cette humanité.
Merci à vous du fond du cœur."


(Auschwitz. Graphisme : J-E Andreux)

Ce poème est l'oeuvre d'Evelyne Fechter (lire le dossier d'Abel et Suzanne Fournier, page 43). Elle avait dix ans lorsqu'elle a tracé ces vers reflétant les tragédies vécues par des enfants aux parents emmenés vers "pitchi poï":

PARENTS DEPORTES

où sont ils partis
(ceux que l'on aimait) ceux qu'on aimait tant
ceux que l'on chérit
oh! nos chers parents ?

vous avez été déportés
et de vos enfants
vous avez été arrachés
oh! pauvres parents

vos enfants sont ici
ils vous attendent
venez, parents chéris
ils vous demandent

nous qui sommes vos enfants
nous vous vengerons
et pour vous, oh chers parents
nous combattrons

nous serons victorieux
nous serons glorieux
car votre foi nous suivra
et la vengeance existera

nous avons encore l'espoir
de vous revoir un jour
mais quand pourrons-nous l'avoir
ce bonheur, pour toujours ?

(Documentation : Viviane Saül, déléguée du Comité Français).

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